Plus qu’une bataille pour le perchoir du Sénat, le derby de ce samedi charrie un gros enjeu entre, d’une part, le confort politique du FCC pour sa majorité et, d’autre part, l’avenir politique pour Bahati Lukwebo qui, en tout et pour tout, n’est parti en croisade qu’avec l’espoir d’une surprise face au bloc kabiliste qui n’a cessé de se resserrer ces derniers jours, conscient des expériences d’Okitundu en 2007 et, tout récemment, de Mende au Sankuru.
Deux poulains FCC vont s’affronter en duel électoral ce samedi au Palais du peuple pour le perchoir du Sénat. Deux poulains FCC, en effet, même si l’un, Modeste Bahati Lukwebo, a pris le temps de convoler en juste autonomie avec une frange de son AFDC, parti politique, et AFDC-A, plate-forme. Un enjeu ultime de leadership au sein de l’actuelle majorité dominée par le FCC, mais que ce dernier entend démystifier, galvanisé dans sa croisade par l’expérience de 2007 dans le duel Okitundu-Kengo et, très récemment, par la désillusion de Mende au Sankuru où il partait pourtant avec un pronostic favorable de 22 députés provinciaux FCC sur 25.
Comme au Sankuru particulièrement, le FCC – dans sa composition globale – pèse 95 sénateurs plus 1 sénateur à vie. A ce nombre se dénombre aussi 13 sénateurs floqués AFDC-A, mais dont la position finale devra être connue ce samedi à travers les urnes. Face à Thambwe-Mwamba qui a la confiance de l’Autorité morale et, sur papier, du reste de la troupe FCC, Bahati Lukwebo n’a avec lui, sur papier, que l’espoir d’une surprise pour renverser la vapeur.
Pour autant et décidément, rien n’est joué tant que le verdict final n’aura pas été rendu. On ne doit, en effet, pas se voiler la face sur l’évidence d’un mini séisme occasionné au sein du FCC par la prise des libertés de Bahati Lukwebo, même si c’est au seul nom d’un seul poste. Et plus qu’un poste, d’ailleurs, le derby de ce samedi se jouera en termes d’influence d’opinion avec pour enjeu la loyauté et la fidélité de chacun des sénateurs à leurs propres engagements avant d’en connaître les véritables arrimages, surtout pour ceux qui se réclament de la kabilie.
L’engagement électoral de ces dernières 48 heures aura été symptomatique du sérieux que chacun a mis dans cette bataille de l’honneur au-delà d’une victoire et du trophée du perchoir de la chambre haute. Il s’agit, pour Bahati, d’un enjeu existentiel qui déterminera le sort de son leadership et, partant, de son envergure politique par rapport aussi bien de son propre parti politique que de sa plate-forme. En cas de défaite, Bahati devra s’attendre, à coup sûr, à un retourne des positions parmi tous ceux qui, ces derniers jours, lui ont clamé leur allégeance et même ceux qui, malgré l’ultimatum du FCC, ne se sont pas encore prononcés.
En un mot comme en mille, Bahati Lukwebo a, certes, misé gros, mais il a beaucoup plus pris un très gros risque en misant son propre sort politique, juste pour un poste, soit-il d’une chambre du Parlement. Même s’il a déjà ajusté son discours en mode opposant, il ne sera pas duper outre mesure l’opinion qui sait qu’il est super floqué kabiliste et connu pour la turbulence de ses engagements. En effet, après avoir tenté de prendre son indépendance à plusieurs reprises, Bahati a, aujourd’hui, atteint un point de non-retour mais dans un contexte fort dangereux pour lui. Certes, son éventuelle défaite n’aura aucune conséquence juridique après qu’il a pris son indépendance vis-à-vis du FCC et de son autorité morale, mais on pourra bien se demander comment il compte évolué dans les rangs de la même majorité dont il se réclame, à moins d’être rejoint plus tard par d’autres dessus du FCC pour former un bloc de frondeurs en chauve-souris, à savoir : membres de la majorité et opposants à cette même majorité au sein du Parlement.
Pour le FCC, qui n’aura pas à craindre d’une érosion outre mesure de sa majorité au Sénat, l’enjeu est surtout de consolider son confort politique nécessaire face à l’adversité d’une certaine opinion nationale et internationale mettant systématiquement en cause l’authenticité de sa large majorité à tous les niveaux, sauf à la présidence de la République. Une victoire de Thambwe-Mwamba viendra, à coup sûr, mettre un peu plus de sérénité dans ses rangs en attendant le comportement des uns et des autres après la distribution des cartes au sein du prochain gouvernement et, plus tard, du portefeuille de l’Etat.
Mais, comme l’a indiqué à juste titre, Alexis Thambwe-Mwamba au soir de mercredi dernier dans une rencontre d’armement moral pour cette élection au Sénat, les sociétaires du FCC vont jouer chacun sa propre personnalité dans l’arène politique, en dehors de tout engagement à la fidélité et à la loyauté envers aussi bien sa plate-forme que son Autorité morale. Membres de la chambre dite des sages, ces Sénateurs seront face à leur conscience politique censé leur dicter la notion de constance et de respect des engagements envers et contre tout et tous. « Je ne doute pas que nous sommes tous conscients qu’il s’agit de l’avenir politique de notre famille politique, de l’avenir politique de notre Autorité Morale, de l’avenir politique du Front Commun pour le Congo, (FCC) », avait-il prévenu avant de cogner : « N’ayons aucune illusion, à supposer par impossible que le samedi, le ticket ne passe pas, il apparaîtra clairement à la face du monde tant au niveau national qu’international que notre majorité est factice et n’existe pas ».
Jonas Eugène Kota